Belgique : Albert Rukerantare menacé pour avoir refusé de collaborer avec le FPR?
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La rumeur courait. Elle vient d’être confirmée : plusieurs personnes, relativement jeunes, n’ayant pas exercé de grandes responsabilités avant 1994 ont été approchées par les recruteurs du FPR pour qu’elles deviennent ses relais dans la grande et majoritairement hostile diaspora rwandaise de Belgique. Certaines se sont mises aussitôt au travail, d’autres sont plutôt inquiètes pour leur sécurité car ayant refusé de collaborer. Ainsi, de source autorisée, nous avons appris qu’après avoir repoussé les avances du régime de Kigali, monsieur Albert Rukerantare se sent menacé.

Il y a déjà quelques semaines que le régime de Paul Kagame à lancer à cor et à cri une vaste campagne en direction des exilés rwandais. C’est après la sortie du Mapping rapport sur les crimes commis par l’Armée Patriotique Rwandaise en RDC de 1989 à 2003, rapport rendu public le 1 octobre 2010. La machine de guerre médiatique et psychologique du régime s’est alors mise en branle. Une forte délégation conduite par la sénatrice Aloysie Inyumba a alors sillonné l’Europe pour, officiellement : démolir le Mapping rapport sur les crimes de l’APR en RDC, expliquer les cas de la « prisonnière de droit commun » et non « politique » Victoire Ingabire et dénoncer la « bande des quatre » à savoir Kayumba-Nyamwasa, Karegeya, Gahima et Rudasingwa. Mais en coulisse, la mission devait surtout recruter des agents parmi la communauté rwandaise de Belgique. C’est ainsi que plusieurs personnes furent approchées par les émissaires du régime avec des propositions de rémunération en échange des services bien précis à rendre au régime. L’opinion venait à peine de digérer la saga d’Eugène Nahimana dont l’intervention à la Radio Rwanda avait fait couler beaucoup d’encre et de salives, que nous avons été mis au courant de la mésaventure de M. Albert Rukerantare.

Albert Rukerantare n’est pas un inconnu de la scène bruxelloise. Il est l’un des poids lourds de la Société Civile Rwandais (SOCIRWA) celle là qui organise les manifestations anti-FPR en Belgique. Nous avons recueilli son récit dans lequel il exprime son étonnement en constatant que le FPR puisse se tromper sur son compte mais aussi sa crainte des représailles car dans sa campagne le régime brandit la carotte et le bâton.

Le 31 octobre 2010, Albert Rukerantare revient à Bruxelles en provenance d’Arusha en Tanzanie, où il était allé témoigner dans le procès de Mathieu Ngirumpatse. Lors de sa déposition, M. Rukerantare a pu démonter les thèses du procureur par des révélations qu’il détient de par son passé comme agent du Service des Renseignements Rwandais. Son témoignage était public et donc les émissaires du FPR à Arusha l’ont enregistré. De retour à Bruxelles, il est frappé par la circulation des rumeurs faisant état de sa probable collaboration avec le FPR. C’est dans ce contexte que le père de Rukerantare qui vit au Rwanda à Ruhengeri échappe de justesse à la mort suite à une moto qui a foncé délibérément sur lui. Il est depuis lors hospitalisé tandis que son agresseur court toujours alors qu’il a commis son forfait au grand jour. Quand on sait que dans l’état policier qu’est le Rwanda de Paul Kagame tout est contrôlé par les services de sécurité, on est en droit de penser que si cet étrange motard reste introuvable, c’est qu’il est protégé par la police ou qu’il effectuait une mission commanditée par les mêmes services. C’est pourquoi Albert Rukerantare a vu derrière cet attentat la main des services secrets rwandais. Il va en avoir le cœur net quand quelques jours après, les 23 et 24 novembre, il sera approché par les recruteurs du FPR (dont nous tairons les noms) et qui lui ont dit avoir reçu la mission de le rechercher. Ils prétendaient avoir le message que le conseiller spécial du président Kagame chargé de la sécurité, le général Rutatina, destinait à Albert Rukerantare. L’autre message proviendrait du général Jack Nziza mais via l’ambassadeur du Rwanda à Kinshasa M. Amandin Rugira. Etonnamment, les deux messages ont la même teneur : demander à Rukerantare d’aider le gouvernement rwandais pour suspendre les manifestations prévues lors de la venue de Paul Kagame en Belgique. L’un des messages est accompagné d’une proposition concrète : faire annuler la manifestation contre une somme de 10.000 euros. M. Albert Rukerantare dit avoir repoussé ces avances mais s’inquiète pour sa sécurité surtout quand il observe quelques indices pouvant montrer que lui et sa famille sont dans le collimateur du FPR.

En effet, les messagers appellent Albert par le nom de son papa blessé (Rukera), sûrement que c’est le nom que leur fournit le patron des services secrets de Kigali. Dans d’autres occasions, ils l’appellent par le nom fautivement repris par l’Agence Hirondelle lors de son témoignage à Arusha à savoir Rukerintare. Or c’est le même nom que reprend le général Rutatina quand il lui envoie un message.

Presqu’au même moment, le frère d’Albert Rukerantare, qui travaillait comme bénévole dans une association sans but lucrative (asbl) faute d’autre emploi quoique universitaire, vient d’être accusé de détournement alors que la gestion de cette asbl était jusqu’en octobre dernier saine et transparente. Un hasard ou un moyen de pression sur Albert Rukerantare pour qu’il accepte de collaborer ?

Maintenant Albert Rukerantare a peur. Nous croyons savoir qu’il a déjà demandé la protection des services habilités. Il nous a révélé que lors de la récente mission conduite par la sénatrice Inyumba Aloysie, une information avait filtrée laissant entendre que les personnes à contacter devaient obligatoirement coopérer et remplir les missions demandées ou dans le cas contraire procéder à leur élimination. La peur devient de plus en plus justifiée que ce ne serait pas la première fois qu’un rwandais disparaît après son refus de collaborer. Le cas de l’ancien ministre Juvénal Uwilingiyimana assassiné le 21 novembre 2005 est encore dans toutes les mémoires.

Emmanuel Neretse
29/11/2010

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