Beaucoup de salives ont coulé sur la Mission, en Europe, conduite par Aloysie Inyumba, une ex-rebelle du Front Patriotique Rwandais(FPR) devenue Député au Parlement rwandais. Cette dame est une femme de caractère. Par sa force et son habileté, elle a recruté le Colonel Alexis Kanyarengwe pour rejoindre le maquis et diriger le Front en guerre contre le Rwanda et en négociation de paix avec le Gouvernement de coalition dirigé par un premier ministre issu des rangs de l’opposition politique.
Aloysie Inyumba fut aussi un infatigable recruteur de jeunes dans les pays voisins du Rwanda. A l’instar des recrutements, Aloysie Inyumba et Alexis Kanyarengwe ont aussi organisé des réunions de collectes de fonds dites « Fundrising », pour alimenter les caisses d’une rébellion qui en avait besoin pour financer la guerre et corrompre les indécis et les sceptiques.
L’enjeu était capital : la conquête du pouvoir. Le multipartisme et les négociations de paix ou de « partage du pouvoir » ont, d’ une part, mis en exergue une autre race de politiciens atypiques dont les incantations magiques furent entre autres, « alternance politique , Rukokoma ou Conférence Nationale Souveraine », copiée aux opposants zaïrois au dictateur Mobutu Sese seko. La guerre et le pluralisme politique ont aussi provoqué des reniements et des retournements de vestes. Le Mouvement Révolutionnaire National pour le Développement, ancien parti unique du Président Habyarimana s’est sabordé. Les cadres et les militants ont quitté ce parti politique pour d’autres voies. Parmi ces voies, le Front Patriotique Rwandais. Les partis d’opposition n’ont pas été en reste. Il y eut alternance entre les nominations d’opposants aux postes de responsabilité, des promotions et des promesses de promotion. Les départs ont pesé lourd sur l’échiquier politique ; mais tel n’ est pas le cas maintenant.
Au pouvoir, le FPR a fait semblant de partager le pouvoir avec ses alliés ; mais il a aussi récupéré des dinosaures de l’ancien parti unique, enterré dans l’exode des populations hutu en juillet 1994. Ils sont, pour l’essentiel, des « copains » de feu-président Habyarimana ou les affidés de son pouvoir.
Dans la suite, les dissidents hutu et tutsi de première heure sont devenus des réfugiés qui, cependant, fréquentent le pouvoir sous couvert de colloques ou de rencontres de réconciliation ou à l’ occasion des fêtes ou des deuils. Le pouvoir va aussi à la rencontre des réfugiés hutu abusivement appelés « Interahamwe » par leurs compatriotes. Il les convie à retourner au bercail, car les raisons de l’exil n’existent plus. Mais ces départs ne laissent pas de vide dans une opposition qui peine à engranger des adhérents, mais on peut estimer que cette opposition sans emprise réelle est aussi la cause de ces rentrées au bercail. Elle ne propose rien en perspective.
Ce qui est paradoxal, c’est que le pouvoir fabrique des exilés qui agissent en ambassadeurs pour infiltrer ou surveiller les opposants et les réfugiés. Dans ce jeu, l’on peut croire que le pouvoir joue gagnant. Pour mémoire, il a écarté les menaces aux frontières en rapatriant manu militari les réfugiés hutu. Sa diplomatie ne laisse pas dormir les résistants encore présents dans la forêt équatoriale de la RD Congo.
Alphonse Bazigira
24/12/2010
###google###