RESUME : En RDC, la problématique du scrutin présidentiel à un tour est restée à la une des nouvelles de la semaine. C’est en un temps record que la révision de la constitution portant sur cette question et d’autres a été approuvée par le Parlement. Une délégation de l’opposition dont le nouveau candidat à la présidentielle, Vital Kamerhe, s’est fait le porte-parole, a marqué sa désapprobation au mode de scrutin auprès de la représentante spéciale adjointe du Secrétaire général des N.U., tandis que deux ONG (RENADHOC et la Voix des Sans Voix) ont évoqué une future crise de légitimité électorale et/ou la possible montée en phase de problèmes sécuritaires et identitaires si ce mode de scrutin était appliqué. De son côté, l’Assemblée nationale a formalisé la désignation des membres de la CENI. On signalera aussi, qu’à Bunia, le parti d’opposition UPC s’est vu interdire de tenir un meeting alors que, peu avant, les membres du PPRD avaient tenu au même endroit une cérémonie de prestation de serment.
Du côté des partenaires internationaux, la Belgique a fait savoir qu’il appartenait aux autorités politiques de la RDC de décider du mode de scrutin tout en insistant sur le respect du calendrier. Par contre au Sénat belge, au cours d’une audition sur le sujet, un expert et un sénateur se sont élevés contre ce qui leur apparaît comme « une dérive dangereuse ». L’ambassadeur des Etats-Unis a déclaré quant à lui que son pays suivra avec intérêt les élections, les candidats à la présidence devant être autorisés à participer au scrutin « sans être intimidés ». La France annonce de son côté qu’elle observera aussi avec attention la poursuite du processus électoral qui devra être libre, ouvert et transparent : elle a toutefois constaté une révision menée dans des délais très brefs. Quant à l’Union européenne, ses ambassadeurs, reçus par le Premier ministre et le président de l’Assemblée nationale, ont fait savoir qu’ils n’ont pas à porter un jugement sur le système électoral, mais ne sont concernés que par un accès équitable aux médias et par un processus électoral libre et sécurisé[1].
Dans le domaine de l’armée, l’ancien ministre belge de la Défense, qui a défendu un partenariat belgo-congolais novateur, a mis l’accent sur la nécessité d’un armée républicaine plus réduite et sur l’importance de forces spéciales. Par ailleurs, un général congolais, porté disparu, a été arrêté à Brazzaville : il serait impliqué dans une infiltration d’hommes armés dans le Bas Congo et le Bandundu.
En matière de sécurité, on signalera une étude sur les causes des conflits au Kivu, région où plus de 1.800 combattants FDLR ont été démobilisés et plus de 1.600 ont été rapatriés en 2010. Au Sud Kivu, un colonel qui appartenait au CNDP de Laurent Nkunda a été arrêté avec sept soldats pour avoir été impliqué dans des viols de masse dans la région de Fizi. Dans la même région ainsi que dans celle d’Uvira, on signale une persécution et des menaces d’enlèvement des albinos comme dans le cas du Burundi voisin. Au Nord Kivu, les opérations « Ruhenzori » contre les ADF/NALU entrent dans leur phase décisive selon le commandement militaire. Par ailleurs, des coupeurs de route continuent à sévir au sud de Butembo où ils se sont attaqués au véhicule d’un prêtre. En Province Orientale, une bande armée qui appartiendrait à la LRA a attaqué un véhicule en territoire de Dungu. En Equateur, une baleinière a été braquée par des militaires du Congo-Brazzaville. Enfin, à Kinshasa, le ministre de l’Enseignement supérieur estime que la mort de l’étudiant retrouvé pendu sur le campus la semaine dernière, mort qui a entraîné des troubles sur ce campus, est une machination visant à provoquer un soulèvement des étudiants.
Dans le domaine des droits humains, le procès Bemba s’est poursuivi au CPI cette semaine avec l’audition de deux autres témoins. À propos de cette CPI, plusieurs experts estiment que les procès et jugements des chefs de guerre congolais devant cette juridiction ont des effets positifs, d’autres experts étant d’un autre avis. Quant au procès Chebeya, il se poursuit avec l’audition de témoins qui laisse penser que des manœuvres de dissimulation de preuves ont eu lieu dans cette affaire. Par ailleurs, l’ONG la Voix des Sans Voix demande la réouverture du procès des assassins présumés de Laurent-Désiré Kabila qui sont une cinquantaine à croupir en prison sans preuves convaincantes. On signalera enfin que le ministre de la Justice s’est rendu à la prison de Makala : il a estimé que la situation y est « préoccupante », mais pas « déplorable », et a demandé que les conditions de détention soient améliorées.
Dans le domaine économique, les vendeurs et vendeuses du marché central de Kinshasa ont manifesté leur mécontentement face à l’augmentation des taxes. Par ailleurs, l’ICCN (Institut de conservation de la nature) et des ONG locales s’élèvent contre le projet d’installation d’une société pétrolière britannique dans une portion du parc des Virunga sans aucune étude d’impact sérieuse.
Dans le domaine des relations Belgique – Congo, une manifestation en hommage à Patrice Lumumba a eu lieu à Bruxelles : ses promoteurs entendent porter plainte pour crime de guerre et demandent qu’une statue soit érigée en son honneur dans la capitale belge.
Au Burundi, le président a promulgué un budget qui dépasse pour la première fois un milliard de dollar. Par ailleurs, une grève sauvage de bus a été déclenchée dans la capitale. Dans le domaine de la justice, le procès portant sur l’assassinat de l’ancien vice-président de l’OLUCOME (Observatoire de lutte contre la corruption) s’est ouvert cette semaine.
En Ouganda, le porte-parole de la plate-forme de l’opposition affirme que la corruption se développe sur une large échelle dans la foulée des prochaines élections : un beau-fils du président est accusé d’avoir offert une somme de 630.000 $ à un opposant pour qu’il se retire du scrutin. Par ailleurs, la commission électorale reconnaît que les partis politiques recourent à des milices, tandis que des observateurs et des diplomates font état de possibles manipulations lors des élections qui doivent avoir prochainement lieu.
Au Rwanda, l’opposante Victoire Ingabire s’est vue refuser pour la troisième fois une demande de mise en liberté provisoire, tandis que les quatre personnalités condamnées par contumace pour atteinte à la sûreté de l’Etat dénoncent une justice au service du chef de l’Etat. Par ailleurs, le premier procès contre un Rwandais inculpé de participation au génocide a eu lieu en Allemagne. Enfin, au TPIR, s’est ouvert un procès contre un capitaine de l’ex-FAR qualifié de « boucher de Butare ».
Kris Berwouts
Eurac
21/01/2011
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[1] Même si l’argumentation des autorités congolaises en faveur d’un scrutin majoritaire à un tour n’est pas convaincante (coût, risques de violences…), ce type de scrutin pour l’élection présidentielle n’est pas une hérésie : il est appliqué dans plusieurs pays (Mexique, Kenya, Philippines, Zambie, Corée du Sud, Malawi, Islande, Togo). On le retrouve aussi lors d’élections parlementaires ou législatives dans le vote par circonscriptions comme au Royaume-Uni et au Canada. L’avantage du système est sa simplicité ; son inconvénient est la déstabilisation politique qu’il peut induire, l’ « élu » pouvant se trouver confronté à une majorité d’électeurs qui n’ont pas voté pour lui ou qui ont voté contre lui.