Royaume Uni-Rwanda: quand populisme et hégémonisme se conjuguent
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Rubrique : Actualité
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Publié le 3 Mai 2024 par Emmanuel Neretse

Le partenariat “Royaume-Uni-Rwanda” visant l’expulsion des demandeurs d’asile refoulés de Grande Bretagne vers le Rwanda s’intègre dans le projet de Paul Kagame de repeupler le Rwanda avec une nouvelle population sans racines ni mémoire historique avec le Rwanda d’ici 2050. Pour Rishi Sunak, il constitue un levier pour faire remonter son parti des conservateurs (Tories) en perte de vitesse dans l’opinion et au mieux lui faire gagner des voix et ainsi rester au pouvoir.

 

Rappel et actualité

 

L’on se rappelle qu’en 2022, le gouvernement du Royaume Uni a initié un partenariat avec le Rwanda visant à expulser vers le Rwanda les demandeurs d’asile au Royaume Uni jugés irrecevables.

 

Ce projet fut rondement mené et médiatisé par celui qui était alors Premier ministre, Boris Johnson du parti Conservateur au pouvoir ; ceci dans sa campagne pour justifier le Brexit en disant qu’il va permettre de stopper l’immigration.

 

Le dossier de l’immigration étant le cheval de bataille de tous les politiciens d’extrême-droite, celui d’entre eux qui pourrait crier comme ayant pu arrêter l’immigration dans son pays aurait donc toutes les félicitations des extrémistes et racistes de tous bords. Du populisme pure et dure.

 

Après sa démission suite aux déboires personnels, le flamboyant Boris Johnson fut remplacé à la tête du gouvernement britannique par Rishi Sunak qui était son ministre des Finances.

Ce jeune Premier ministre, sachant que son parti, les Conservateurs, était empêtré dans des affaires et en perte de vitesse et donc n’avait aucune chance de remporter la majorité lors des élections prévues en 2024, a redoublé d’efforts dans le populisme visant à faire croire aux citoyens britanniques que son parti et son gouvernement avaient un plan pour arrêter définitivement l’entrée des immigrants au Royaume Uni. Ce plan consistait à déporter systématiquement au Rwanda ceux qui parviendraient à venir demander asile en Grande Bretagne.

 

Forcing et coup médiatique

 

Malgré les décisions des instances judiciaires du Royaume Uni, les avis des ONG de défense des droits de l’Homme, des partis politiques d’opposition comme le parti Travailliste (Labour) et même la Chambre Haute du Parlement (Chambre des Lords), …, Rishi Sunak a fait voter, en avril 2024 et en forçant, une loi cynique lui permettant de renvoyer les demandeurs d’asiles déboutés au Rwanda de Paul Kagame à qui il a versé anticipativement des centaines de millions de Livres Sterling à cet effet.

 

Et comme pour montrer que les termes du partenariat entre le Royaume Uni et le Rwanda commenceraient à être mis en pratique, tous le médias du monde ont publié une dépêche disant que le mardi 30 avril 2024, enfin UN demandeur d’asile au Royaume Uni  venait d’être expulsé vers le Rwanda.

 

Bien entendu, Rishi Sunak s’en est félicité en prétendant que ceci était une preuve que ce marché avec Kagame commencerait à porter ses fruits car le déporté l’aurait consenti volontairement. Sans aller jusqu’à scruter comment ce réfugié a été désigné “volontaire” pour aller au Rwanda contre une enveloppe de 3 500 euros, tout le monde comprendra qu’il s’agit d’un coup médiatique et surtout pas suite à la dissuasion supposée du projet “Sunak-Kagame” chez les demandeurs d’asile au Royaume Uni. Et puis, un seul réfugié par mois refoulé sur les 9.000 sur la liste d’attente, à ce rythme, Rishi Sunak risque de ne pas remplir sa part du contrat avec Kagame avant la fin de la législature actuelle pour qu’il en bénéficie lors des prochaines élections législatives de fin 2024.

 

Mais ironie du sort et comme pour refroidir et contredire Rishi Sunak qui jubilait en disant que cette expulsion démontrait que sa loi montrait son efficacité pour dissuader les migrants d’arriver en Grande Bretagne, les mêmes médias ont annoncé que plus de 700 migrants avaient traversé la Manche pour atteindre l’Angleterre la seule journée du 02 mai 2024.

 

Concours des circonstances

 

Ce partenariat entre le Royaume Uni et le Rwanda de Kagame qui est visiblement illégal, immoral et que même certains osent qualifier de “trafic d’êtres humains” donc un crime, a été rendu possible et est facilité dans son application par un concours de circonstances rarement réunies dans le monde.

 

Similitudes entre Rishi Sunak et Paul Kagame

 

Il faut d’abord souligner que les pilotes aux commandes  pour faire atterrir ce plan ont des similitudes qui les conduisent à agir dans le même sens.

Tous les deux règnent sur les pays dont ils étaient encore étrangers il y a à peine une génération.

En effet Rishi Sunak est un indo-pakistanais dont les parents originaires du Penjab ont émigré en Grande Bretagne en 1960. Lui, il y est né en 1980.

Tandis que Paul Kagame est arrivé en Ouganda dans le dos de sa mère en 1959 quand il avait donc 2 ans. Il sera ensuite naturalisé ougandais et même sera officier dans l’armée régulière de ce pays dont il dirigera les renseignements militaires. C’est donc dire qu’en 1994 quand il s’est retrouvé à la tête du Rwanda, où la double nationalité était interdite, c’est comme conquérant militaire ougandais. Et il se considère comme tel pendant ses 30 ans au trône.

 

Mêmes ambitions mais cadres différents

 

En consacrant des efforts énormes dans ce projet, Rishi Sunak et Paul Kagame entendent assouvir chacun ses ambitions politiques même si elles sont d’ordres différents. L’indo-pakistanais et britannique Sunak compte avec ce partenariat pour gagner en popularité et ainsi garantir sa carrière politique qu’il espère longue vu son jeune âge. Surtout quand il constate que son parti, les Conservateurs, (droite et extrême droite) est en perte de vitesse comme l’indiquent les résultats des élections locales de ce début mai 2024.

 

Quant à l’ougando-rwandais Paul Kagame, il voit dans ce partenariat l’une des voies de parachever son projet machiavélique et criminel de repeupler le Rwanda par un méli-mélo de gens importés de l’étranger d’ici 2050.  C’est là où les intérêts des deux larrons se rencontrent et se complètent.

 

Scandale et immoralité permis car le contexte y est favorable

 

L’on notera aussi que le contexte géopolitique et économique du moment est favorable pour que les politiciens véreux s’adonnent aux actes immoraux et qui apparaitraient comme scandaleux à d’autres époques.

 

En effet, l’occident et le monde en général est préoccupé et son attention est concentrée sur le conflit en Ukraine. La possible victoire ou non défaite de la Russie dans cette guerre signifierait la perte de crédibilité et d’influence de l’occident sur le reste du monde et surtout la relativisation de l’omnipotence de l’OTAN qui arme et conduit l’Ukraine dans ce conflit.

 

Par ailleurs, l’occident, et particulièrement les Etats Unis, se sont pleinement investis dans la guerre que l’état hébreux créé par eux en 1948 et installé en Palestine, mène pour anéantir définitivement et à jamais toute résistance des palestiniens dont le territoire est sous occupation depuis 76 ans, à commencer par éliminer le Hamas dans Gaza. Ce n’est donc pas l’envoi ou la vente de quelques demandeurs d’asile déboutés à un dictateur assoiffé d’argent mais aussi pratiquant le nettoyage ethnique quelque part en Afrique qui va attirer plus l’attention de l’opinion mondiale.

 

D’une pierre deux coups pour Rishi Sunak

 

°L’actuel Premier ministre britannique, avec ce partenariat, fait une parade pour ne pas risquer d’être accusé de ne rien faire contre les immigrants parce que lui-même serait un ancien immigrant;

°Mais en même temps, en sévissant contre les immigrants, comme lui est non WASP (White Anglo-Saxon and Protestant), il ne risque pas d’être accusé de “raciste” comme quand cela serait fait par un Premier ministre pur WASP.

 

D’une pierre plusieurs coups pour Paul Kagame

 

°Pour Paul Kagame, ce partenariat est dans la droite ligne de son projet à long terme de repeupler le Rwanda par des gens sans aucune racine dans le pays, brisant ainsi le mythe de la « majorité hutu »;

°Ce projet vient ensuite concrétiser sur le terrain l’état d’Apartheid de fait. Et cela à commencer par faire de Kigali et de la province de l’Est en général un Tutsiland ou toute richesse, tout signe de développement économique et social doivent être concentrés exclusivement.

°Avec ce marché conclu avec Sunak, Paul Kagame entend faire gagner des millions versés par l’UK à sa clique dont les immeubles doivent abriter ces migrants alors qu’ils manquaient de locataires car trop cher pour un rwandais moyen.

°Enfin, avec ce marché Paul Kagame rend le Royaume Uni son obligé pour le soutenir et le défendre en tout et partout même quand il serait rejeté et unanimement condamné par le monde pour ses crimes.

 

Affaire de gros sous: couple Tony et Cherie Blair, Mitchell et Kagame

 

Cet accord ou patenariat entre le Royaume Uni et le Rwanda de Kagame constitue aussi et surtout une affaire de gros sous, même si cet aspect n’est pas souvent évoqué ou est occulté à souhait. Les acteurs sont en entre autres Tony Blair, ex-premier ministre britannique et qui est actuellement conseiller spécial de Paul Kagame, son épouse Cherie Blair, avocat du général Karake Karenzi lors de son arrestation en Grande Bretagne le 25 juin 2015 et qui fait des affaires juteuses via des projets de développement au Rwanda. Enfin, il y a Andrew Mitchell ministre du Développement international dans le gouvernement Sunak et qui s’est fait grassement payé par Kageme pour des conseils lui prodigués.

 

Parades au projet criminel et mafieux

 

Après cet exposé des faits, l’on pourrait se demander, et avec raison, s’il y aurait encore des parades à ce projet mafieux et criminel car il il s’agit ni plus ni moins que d’un trafic d’êtres humains.

 

A notre niveau nous voyons que ce projet macabre peut encore être combattu et cela à plusieurs niveaux:

 

Justice et ONG britanniques.

Le système judiciaire britannique n’étant pas tout à fait déboutée de cette affaire, il pourrait toujours s’en saisir et contraindre le gouvernement Sunak à arrêter ce trafic d’être humains. Il en est de même des organisations de défense des droits de l’Homme qui ont toujours dénoncé ce projet. Même si cela est contourné par Sunak pour faire passer son projet, elles conservent une voix qui porte et loin.

 

Plainte des fonctionnaires

Les fonctionnaires britanniques ont déposé une plainte contre le projet Sunak, considérant qu’ils pourraient être amenés à poser des actes non compatibles avec leur statut dans ce projet d’expulsion des migrants vers le Rwanda.

 

Immigrants eux-même

Les immigrants eux-mêmes devraient, à travers leurs avocats, user de tous les moyens et de toutes les voies possibles pour refuser d’être expulsés de force vers le Rwanda.

 

Le peuple britannique par les urnes

Le peuple britannique , dans sa souveraineté pour l’attribution du pouvoir, a la possibilité de dire que ce deal entre Paul Kagame et le Premier ministre de sa Majesté, est inique et déshonorant pour le Royaume Uni. Il suffit que le peuple inflige, par les urnes, une défaite cuisante au parti Conservateur de Sunak lors des prochaines élections de l’automne 2024. Ceci est non seulement possible mais aussi probable. Déjà à quelques mois des élections dans tout le pays, attendues au second semestre 2024, les sondages annoncent une défaite cuisante pour les conservateurs, au pouvoir depuis 14 ans.

Ceci serait un message fort car le parti d’opposition, le Labour, a déjà annoncé qu’une fois au pouvoir, il abrogerait ce projet.

 

ONG et opposition rwandaises

Les organisations politiques comme celle de la société civile rwandaises en exil et donc ayant la possibilité d’exprimer leur point de vue car au Rwanda-même de Paul Kagame elles sont interdites, doivent prendre cette affaire à cœur et saisir toute occasion pour dénoncer et fustiger ce projet inhumain et criminel de trafic d’êtres humains entre Rishi Sunak et Paul Kagame.

 

Protestation des pays voisins notamment la RDC et le Burundi

Les pays voisins du Rwanda de Kagame qui sont agressés depuis des années ou qui sont ouvertement  menacés par ce dictateur, devraient noter et s’inquiéter des conséquences de l’application de ce partenariat entre Rishi Sunak et Paul Kagame.

 

Ainsi, la RDC agressée et dont la province du Nord Kivu est occupée par l’armée de Paul Kagame, devrait noter et s’inquiéter du fait que parmi ces refoulés du Royaume Uni que Kagame va accueillir se trouvent des anciens combattants du Moyen et Proche Orient et que Kagame compte envoyer, une fois au Rwanda, en RDC dans ses troupes d’occupation du M23/ RDF.

 

De même, le Burundi devrait bien noter et s’inquiéter que l’envoi des immigrants refoulés du Royaume Uni vers le Rwanda va peser sur sa propre sécurité car comme Paul Kagame et ses créateurs et soutiens occidentaux ne jurent que de renverser le régime démocratique en place actuellement, pour le remplacer par un régime dictatorial au modèle de celui en place au Rwanda depuis 1994, le repeuplement du Rwanda et surtout les gains financiers que Kagame en retire constituent une menace existentielle contre le Burundi souverain et démocratique.

 

Affaire à suivre.

 

Emmanuel Neretse

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