Le 04 août 2009, le ministre de la défense du Rwanda, le général Marcel Gatsinzi a présenté devant l’Assemblée nationale un projet de réforme des Force Rwandaises de Défense. Sous cette appellation, entendez le nom qu’a adopté l’Armée Patriotique Rwandaise (APR) quelques années après avoir conquis le Rwanda venant de l’Ouganda voisin.
Jusqu’aujourd’hui, cette armée est constituée : d’une force terrestre, d’une force aérienne et d’une marine.
La réforme est caractérisée par la disparition de la marine qui sera intégrée dans l’armée de terre. Il est aussi question d’une nouvelle force dite de « réserve » qui comprendra des ex-militaires, les démobilisés et d’autres personnes recrutées dans la population. Enfin, il est question de la création d’une unité spéciale indépendante chargée de la protection des hautes personnalités de l’état.
A première vue, cette réforme semblerait relever d’un processus normal d’une armée soucieuse de s’adapter à son temps. Cependant les observateurs les plus informés des problèmes de défense et connaissant la vraie nature du FPR n’auront aucune peine à y déceler les manifestations de la volonté du FPR de garder sa mainmise sur l’armée.
En effet, si l’intégration de la marine dans la force terrestre peut paraître logique dans un pays sans littoral et sans voies navigables, il est quand même étonnant que cela survienne au moment où son commandant, le Colonel Firmin Bayingana est en train d’être jugé pour une affaire louche.
Par contre, la création d’une force de réserve élevée au rang d’une des composantes de l’armée au même titre que l’armée de terre est hautement politique. Par cette réserve, le FPR veut conserver la suprématie numérique des Tutsi dans l’armée. En effet, ne pouvant plus contrôler de façon systématique l’identité et le parcours de chaque recrue comme du temps du maquis, le FPR veut se prémunir d’un débordement des Hutu dans l’armée. Avec la réserve dans laquelle seront versés les anciens militaires triés sur le volet mais d’après des critères non transparents, tout comme ceux qui seront recrutés, cette composante de l’armée n’aura toujours rien avoir avec la structure de la population rwandaise comme il en est avec l’armée actuelle.
###google###
Selon le même projet, il sera mis sur pied une force spéciale chargée d’assurer la protection des hautes autorités de l’Etat. Il est spécifié que cette force spéciale n’entrera dans aucune structure de l’armée ni de la police. En clair, elle sera une force privée. Kagame aura donc désormais la possibilité de faire légalement appel aux étrangers qui seront plus chargés de surveiller l’armée que d’assurer la sécurité de 4 ou 5 personnes. C’est donc un appel du pied aux compagnies privées de sécurité comme il en existe beaucoup aux Etats-Unis et en Afrique du Sud.
Mais les Rwandais commencent à s’y habituer. Le gouvernement « officiel » est doublé par un gouvernement « bis » comprenant des personnalités venant des quatre coins du monde. Même le plus naïf des Rwandais sait distinguer entre un et Bernard Makuza et un Tony Blair, qui est le « véritable » premier ministre du Rwanda. Dans quelques mois, nous connaîtront le « véritable »chef de l’armée. Il sera un étranger et sera officiellement commandant de la fameuse force spéciale. James Kabarebe (ou celui qui le remplacera…) gardera certes son titre ronflant, mais pas plus que Makuza, il ne sera plus le patron de l’armée.
Ainsi va le monde selon le Front Patriotique Rwandais.
Emmanuel Neretse
Bruxelles 13 août 2009