Kigali, Kinshasa et Monusco se livrent une guerre de chiffres
Ils nous fatiguent avec la guerre de chiffres et savent bien qu’ils n’ont ni les moyens ni la volonté de combattre les FDLR, s’exclame Anicet Akilimana de Rutshuru. Car, si les FDLR ne désarment pas, cela signifie qu’ils ne veulent pas rentrer chez-eux au Rwanda et si on ne les force pas à désarmer, cela veut dire que tous les protagonistes de la paix au Kivu en trouvent leur compte, chacun à sa manière, conclut Masumbuko Onésime.
Quel est l’effectif actuel des FDLR au Congo ? 800 personnes selon le décompte de la Monusco qui observe parce qu’elle a refusé de combattre les FDLR à cause de la présence du général Fall Sikabwe. 390 personnes d’après le gouvernement de la RDC qui, officiellement, les combat seul. 3.500 personnes selon Kigali qui les contrôle avec Satellite. Sous estimation, surestimation du nombre. Dans ce jeu-là, les populations congolaises ne trouvent pas leur compte. Elles subissent.
Mais, au-delà de l’hypocrisie des protagonistes de la paix à l’est, la difficulté première reste dans la définition des termes combattants actifs et de leurs dépendants. Par exemple, un enfant de 12 ans est-il combattant ou dépendant ?
Les FDLR vivent dans un environnement politique et sécuritaire qui leur est relativement (60%) favorable et qui leur permet de se mouvoir et de réaliser des profits commerciaux. Ce qui hypothèque les chances d’un désarmement et d’un retour volontaire au Rwanda.
Pour les FDLR, rien ne sert de courir. Ils utilisent le territoire congolais non pas comme base arrière des attaques contre le Rwanda mais comme terre d’accueil et de business.
Ce qui leur permet de prélever des taxes, d’exploiter les minerais, de contrôler le commerce et de dominer politiquement les populations locales sous leur gestion.
FDLR, un enjeu pour tous les protagonistes de la paix à l’est
Qu’il se nomme Monusco, Kigali ou Kinshasa, les DFLR constituent un vrai enjeu pour tous ces protagonistes qui se tapent la poitrine de vouloir en finir avec les Hutu rwandais au Kivu.
Les positions contradictoires des protagonistes le prouvent. D’abord la Monusco et le gouvernement congolais n’ont pas de politique systématique de rapatriement des FDLR face à la position de refus catégorique du régime de Kigali de les recevoir au Rwanda.
Ensuite entre la Monusco et le gouvernement congolais, il y a des sons discordants, mieux le divorce consommé sur cette question des FDLR. On note une totale absence de coopération en vue d’une solution définitive. Le désarmement et le rapatriement des combattants FDLR ont échoué parce qu’enfin ils constituent une main-d’œuvre et des partenaires avérés dans la chaîne d’exploitation et de vente des minerais pour le Rwanda d’abord et pour les vendeurs d’armes enfin.
Lorsque la RDF (Rwanda) pénètre sur le sol congolais comme en 2009, c’est plus pour le pillage des ressources minières du Congo que pour la traque des FDLR.
Au final, il n’y a pas de honte à relever un fait probant qui est devenu une évidence : « la capacité d’intervention militaire des Fardc et des Casques bleus contre les FDLR demeure trop faible ». On ne combat pas des Forces négatives, des groupes armés étrangers par des attaques occasionnelles et sporadiques.
Les FDLR n’ont aucune envie de retourner au Rwanda. Et tous les protagonistes de la paix à l’est les y aident à réaliser leur rêve, celui de s’installer dans la durée en RDCongo où certains ont créé des moyens d’existence ou acquis des biens immobiliers. Le reste est à verser dans le panier des intentions. Et on le sait, même l’enfer est pavé de bonnes intentions.
Mathias Ikem
Source : »Les Coulisses »
Bimensuel francophone indépendant spécialiste des Grands Lacs n°279 du 15 août au 3 septembre 2015.