En Belgique, après des semaines de campagne de recrutement menée par les plus grands propagandistes du FPR, une dizaine de « jeunes » d’origine rwandaise sont allés passer le mois de décembre au Rwanda. Ils s’y sont rendus dans le cadre d’une opération baptisée par ses initiateurs « Come and See » qui vise à les amener sur place pour leur vanter les « réalisations » du régime dictatorial afin qu’à leur retour en Belgique, ils véhiculent une image positive du régime de Paul Kagame. Ils ont donc été pris en charge dès leur domicile jusqu’à Kigali par les services gouvernementaux. Ils ont ensuite été encadrés par les plus hauts dignitaires du régime et ont participé à des rencontres réunissant les plus hautes autorités de l’État dont le président Kagame lui-même. C’est donc dire l’importance que le régime entendait attacher à cette opération de séduction.
Interrogations
Dès la connaissance des identités des personnes qui ont fait le voyage, d’aucuns se sont étonnés de découvrir parmi le groupe des personnes qui ont été des hauts responsables de la jeunesse du MRND plus connue sous le nom d’Interahamwe, d’autres qui étaient régulièrement et publiquement accusées d’avoir commis des crimes au Rwanda. En les voyant embarquer sans aucune crainte vers le Rwanda, d’autres se sont demandés si ces « jeunes » n’avaient pas bénéficié d’une amnistie avant leur départ. Effectivement, arrivés à Kigali, ils furent accueillis en hôtes de marque sans être inquiétés par la justice. Un procureur qui avait pourtant dénoncé dans une émission de la Radio Télévision Belge Francophone (RTBF) intitulée « Les génocidaires sont parmi nous ! » de septembre 2008, la présence d’une des personnes du groupe en Belgique, ne s’est plus souvenu de ses propos. Même la redoutable association des rescapés « IBUKA » dont la simple dénonciation vaut plus lourd que la condamnation par tous les tribunaux est restée muette.
Retour en Belgique et début « d’évangélisation » difficile
De retour en Belgique, les meneurs du groupe organisent dans un Hôtel cinq étoiles de Bruxelles une conférence de presse pour rendre compte de leur mission et commencer « officiellement » leur ministère. Ils vont réaffirmer qu’à aucun moment ils n’auront eu crainte d’être judiciairement poursuivis au Rwanda. Dans la foulée, ils vont tenter d’approcher les Rwandais dans leurs milieux « naturels ». C’est ainsi qu’ils se sont rendus dans un café tenu et fréquenté par des Rwandais. Ils ont failli se faire lyncher avant même de commencer à prêcher « la bonne parole ». C’est après cet incident qu’ils commencent à réaliser qu’ils sont devenus des parias dans la communauté rwandaise de Belgique.
Coup de théâtre
Dans une lettre datée du 11 janvier et rendue publique le 20 janvier 2011, un groupe de 23 personnes qui se disent « rescapés du génocide » demandent à Paul Kagame de les rassurer car ils étaient sous le choc. Ils disent avoir été très surpris de découvrir que les plus grands criminels, dont ils citent trois noms, étaient parmi ceux qui avaient fait le voyage du Rwanda sans être inquiétés par la justice. Sans être les mandataires officiels de l’Association IBUKA, on notera que les signataires sont connus comme constituant l’aile dure de l’extrémisme tutsi. Face à ce développement pour le moins gênant dans la marche de l’opération « Come and See », les instances officielles se réfugient dans un mutisme non trompeur, au moment où quelques timides dénonciations de la part des rescapés proches du FPR apparaissent sur le net.
Imbroglio
L’absolution dont ont, sans aucun doute, bénéficié les ex-Interahamwe (Camarade et Cie) avait-elle été approuvée par tous les rescapés ? Si oui à quel prix ? Que gagne le FPR à purifier ces personnes qui sont elles-mêmes exclues de leurs milieux hutus ? Dans tous les cas, les nouvelles recrues du FPR sont entre le marteau et l’enclume : elles sont des parias chez les Hutu et restent toujours suspectées chez les Tutsi.
Quelques explications ?
Le FPR a toujours utilisé la carte de la défense des Tutsi pour arriver à ses fins politiques mais pas du tout pour le bonheur de ces derniers. Quand il a envahi le pays le 01/10/1990, il a crié haut et fort qu’il venait libérer les Tutsi de l’intérieur et en même temps ramener ceux de l’extérieur dans le pays de leurs ancêtres. On découvrira tout au long de la guerre qu’il n’était intéressé que par la conquête du pouvoir politique par les armes quel que soit le prix à payer par les Tutsi. Quand il a mené l’assaut final d’avril à juillet 1994, le FPR proclamera qu’il était en train d’arrêter le génocide. Après la conquête du pouvoir, il va utiliser ce génocide à des fins politiques sans se soucier des éventuelles victimes. Le régime qu’il installe va emprisonner pour génocide des personnes qui ne l’arrangent pas, au moment où d’autres dont on a toutes les raisons de penser qu’elles auraient pu planifier ou commettre le génocide sont associées au pouvoir. Exemple : RucaguBoniface, ancien membre du Comité du MRND, Gatsinzi Marcel, ancien Chef d’Etat major des FAR, Rwarakabije Paul, ancien commandant des FDLR, etc.
La lettre des 23 personnes démontre qu’IBUKA officielle est devenue plus politique qu’une organisation qui défend les rescapés. IBUKA se mobilise seulement quand il faut soutenir la propagande du pouvoir. Ainsi, elle n’a pas hésité à manifester contre les acquittements prononcés par le TPIR malgré le ridicule que revêt ce geste. Par contre elle reste muette quand les Interahamwe sont massivement recrutés soit en RDC dans les FDLR soit en Belgique.
Disons en guise de conclusion que le FPR, en tant qu’organisation mafieuse, ne s’est jamais soucié du sort des rescapés. Seule la domination politique et économique étendue à toutes les couches du peuple rwandais l’intéresse.
Emmanuel Neretse
23/01/2011
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