Pays-Bas: L’arrestation de Charles Ndereyehe survient 5 ans après qu’un tribunal de La Haye l’ait blanchi
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Rubrique : Actualité


Publié le 9 Sep 2020 par Gaspard Musabyimana

Le 8/9/2020, la police néerlandaise a arrêté Charles Ndereyehe, un des cadres du parti FDU-Inkingi et qui était, depuis des années, dans le collimateur du FPR. Ce dernier a utilisé ses délateurs dont Tom Ndahiro, Jean Damascène Bizimana de la CNLG et Rakiya Omar qui ont monté des accusations fallacieuses cousues de toutes pièces avec de multiples articles qu’ils ont publiés entre 2010 et 2012.  Le terrain étant préparé, le régime de Paul Kagame s’est engouffré dans la brèche. La justice néerlandaise a pris ses accusations au sérieux et a ouvert un procès contre Charles Ndereyehe. Les accusation contenues dans l’arrêt de la cour du 3 juillet 2015 peuvent être résumées comme suit :

1/Compte tenu de la position du demandeur [Charles Ndereyehe] en tant que directeur général de l’ISAR et en tant que membre du MRND, du CPR et de la CDR, il est inconcevable qu’il n’ait pas eu connaissance des massacres sur le site de l’ISAR. Le tribunal a considéré cette accusation comme étant non suffisamment étayée.

De fait, Charles Ndereyehe n’a jamais appartenu à la CDR. Les listes des membres fondateurs de la CDR sont connues et on fait objet des enquêtes du TPIR. Aucun acteur de la scène politique rwandaise actif entre 1992 et 1994 ne peut pointer Charles Ndereyehe du doigt et affirmer qu’il aurait été membre de la CDR.

2/Les crimes commis par un certain Rutunga des Interahamwe et employé à l’ISAR RUBONA dont Charles Ndereyehe était directeur général. Il s’agit de la « responsabilité du supérieur hiérarchique » largement débattue dans les procès du TPIR. La Cour a considéré que le Procureur n’a pas soigneusement vérifié si le plaignant entretenait un rapport d’autorité avec Rutunga lors des massacres sur le site de l’ISAR à Rubona ou qu’il pourrait l’influencer et le juge a conclu que le procureur n’a pas suffisamment motivé le fait que le demandeur savait que Rutunga était coupable des crimes allégués.

Charles Ndereyehe n’a jamais soutenu les milices Interahamwe. Ceux qui étaient au Rwanda savent que les affrontements des milices des partis politiques ont commencé début 1992 et se sont amplifiés en mai 1992. A notre connaissance, durant cette période, Charles Ndereyehe était à Rubona depuis février 1992. L’organisation des milices entre 1991-1993 est amplement documentée dans un texte que l’ancien ministre de la défense Dr James Gasana a soumis à la Commission d’enquête du Parlement français. Les accusations concernant les milices en relation avec Mr Ndereyehe sont de la pure fiction.

S’agissant des crimes commis sur le site de Rubona en général et contrairement à ce qu’affirment les délateurs en provenance du FPR, nous savons, de sources sûres et dignes de foi que, que jusqu’à la clôture des Gacaca, Mr Ndereyehe n’a jamais fait objet ni des Gacaca de RUBONA ni impliqué de près ou de loin dans les procès qui ont eu lieu entre 2000 et 2002 concernant les crimes commis à l’ISAR- Rubona. Les Tribunaux ont conclu que la responsabilité de ces crimes était personnelle et individuelle. Par ailleurs, plusieurs auteurs affirment que la Station de Rubona fut le refuge de tous ceux qui se sentaient menacés dans les communes environnantes. Le CNLG a insinué le contraire, et a produit, pour ce faire, de faux documents y relatifs.

Sur ce même registre, les manœuvres ont été nombreuses et Ndereyehe fut mis sur les listes publiées par INTERPOL. Le fait que son nom figure sur ces listes n’est pas une preuve de sa culpabilité. En effet, ces listes sont faites sur demande des pays membres. Les règles d’Interpol reposent sur le principe de souveraineté nationale qui fait que la source des données enregistrées reste propriétaire de ses données. Dans le cas d’espèce, c’est le gouvernement du FPR qui est responsable des accusations envoyées à Interpol pour neutraliser ses opposants réels ou supposés.

Beaucoup de membres des FDU ont été mis sur des avis de recherche lancés par le gouvernement du FPR après la création des FDU-Inkingi en 2006. D’autres ont été ajoutés après l’arrivée au Rwanda de la Présidente d’alors des FDU-Inkingi Mme Victoire Ingabire Umuhoza en 2010 pour challenger le général Kagame dans les élections présidentielles. Enfin, beaucoup d’autres figurent actuellement sur la liste des personnes recherchées depuis la création de la plateforme P5, une coalition des organisations politiques en exil.

Ce n’est donc pas pour rien que l’appartenance aux FDU-Inkingi figure sur la liste des accusations portées contre Ndereyehe. Tout le monde sait que le parti FDU-Inkingi est une des principales forces politiques de l’opposition démocratique au FPR. Il est donc facile de comprendre pourquoi la dictature du FPR s’acharne contre ses leaders.

3/ La connaissance par le demandeur du but génocidaire de l’Auto Defense Civile. Le juge a tranché en faveur de Charles Ndereyehe et a été d’avis que cette accusation est également insuffisamment étayée.

L’auto-défense civile (ADC) à Butare a fait objet d’enquêtes fouillées du TPIR. En ce qui concerne Butare, la jurisprudence du TPIR est sans équivoque (voir « Le Procureur c. Nyiramasuhuko et consorts, affaire n° ICTR-98-42-T »).

Le cas de la Défense civile à Butare a été largement débattu dans le procès  Ntezilyayo et Kanyabashi au TPIR. Les deux coaccusés responsables du recrutement, de l’armement et de l’entrainement de l’auto-défense civile à Butare ont été acquittés du chef d’accusation d’actes de génocides commis par certains individus de l’ADC. Le TPIR en a également déchargé les ministres Bizimungu Casimir, Bicamumpaka Jérôme et Ntagerura André alors qu’ils faisaient partie du gouvernement qui a mis en place le programme de l’auto-défense Civile (ADC).

Le procès diligenté par un tribunal de La Haye a donné raison à C. Ndereyehe sur toute la ligne mettant ainsi fin aux enquêtes qui avaient commencé en 2010. Il a rendu sa décision dans un arrêt daté du 3 juillet 2015 comme signalé ci-haut. En substance le tribunal a considéré que les faits reprochés à Charles Ndereyehe n’étaient pas suffisamment étayés.

Le rebondissement dans le dossier de Chales Ndereyehe tombe comme un couperet et fait penser aux nouvelles manœuvres de Kigali dans cette affaire.

Gaspard MUSABYIMANA
9/9/2020

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